à Mademoiselle Jeanne Moreau
Franciscus Gysbrechts, Vanité, seconde moitié du XVIIe siècle
Refrain
Vanitas vanitatum,
dans ma boîte à vanité,
où tout est futilité,
j’ai de quoi maquiller l’Homme.
Omnia vanitas,
en faire ce que je veux,
de mes pinceaux, de mes strass,
rendre l’imbécile heureux.
Regarde bien celui-là
dans son complet bleu pétrole
il a la gueul’ de l’emploi,
une vraie tête à torgnoles,
une vie de meurtrissures,
plus un corps : une morsure !
Mais si j’ouvre ma valise,
je te parie un gin-fizz
que je fais son cœur zéphyr,
que ses yeux seront saphir.
Mais aurais-je assez d’azur
pour estomper ses blessures ?
Refrain
Et cet autre, l’ombrageux,
qui s’embourbe peu à peu,
entre colère et chagrin,
dans un verr’ de mauvais vin,
vomira, dans un instant,
sa bêtise en sanglotant.
Mais si je sors de mon sac,
le safran, le fauve et l’or,
je te parie un cognac,
que je le change en milord.
Trouverais-je assez de cuivre
pour le voir un temps revivre ?
Refrain
Celui-ci est encor pire,
empêtré dans ses grands airs,
enfiévré comme un vampire,
son âme est crépusculaire.
Le peu de sang qu’il lui reste :
souvenir de Bucarest !
Mais si je tir’ de ma trousse
amarante et incarnat
je te parie une rousse
que le blanc sera grenat.
Où est mon crayon carmin
que j'en refasse un gamin ?
Refrain
Observe-les bien de près!
Pas un pour racheter l'autre.
Le malheur est dans leur pré
pourtant ils sont bons apôtres
mais l'amertume est la soeur
des grands malades du coeur.
Alors tu comprends pourquoi,
entre deux coups de brandy,
je leur dessine parfois
un recoin de paradis
aux couleurs de l'arc-en-ciel,
comme sucre dans le fiel.
Refrain
Vanitas vanitatum
Omnia vanitas (ad libitum)
Paroles : Arnaud Roi
Musique : Stéphane Montigny
© Arnaud Roi 2012